Deuxième contribution de l’association RUBRESUS à la consultation du Plan de Prévention du Bruit du Conseil départemental de l’Aude
Eoliennes : une énergie douce certes mais néfaste pour la santé et le cadre de vie des riverains par ses nuisances sonores
Le département de l’Aude est en pointe dans le domaine des énergies renouvelables et notamment l’éolien. Cependant, le développement actuel de cette ressource se fait au détriment de la santé et du cadre de vie des habitants à qui on impose l’implantation d’éoliennes à une distance trop proche (500 m) qui est source de nuisances sonores et autres d’impacts néfastes sur la santé et le cadre de vie. Nous demandons au Conseil Départemental qu’il adopte une démarche vertueuse de haute qualité environnementale intégrant la protection des populations exposées au nuisances sonores des éoliennes, et qu’il préconise une distance d’implantation des éoliennes à au moins 1000 m, que la plupart des pays a adoptée et que les instances sanitaires françaises recommandent. Le Plan de Prévention Bruit (PPB) que le Conseil Départemental soumet à la population par cette consultation est une excellente opportunité de prévenir les nuisances sonores des élilennes.
En date du 25-02-2015 Jean-Pierre Riou a publié un article dans Paroles Libres qui démontre clairement les nuisances sonores des éoliennes mais en même temps l’indifférence totale des responsables politiques.
Nous profitons de l’occasion présentée par le Conseil Départemental pour déposer notre commentaire ci-après dans le Plan Prévention Bruit ( PPB ) qui s’appuie sur la documentation scientifique et technique internationale et la publication de J-P Riou.
Avec plein de projets dans notre département dont plusieurs dans le Grand Narbonne (Cuxac d’Aude, Montredon-des-Corbières, Névian, …) nous espérons que nos représentants au Conseil Départemental ainsi qu’à l’Assemblée Nationale et au Sénat prendront bien en compte cet article et décident ENFIN de défendre la santé des riverains audois des centrales éoliennes et des citoyens français, en déplaçant la distance des centrales éoliennes à minimum 1000 m comme le Sénat l’a demandé et voté. Il convient de saluer le véritable combat qu’ont dû mener certains d’entre eux pour protéger la santé des riverains. De cette façon la France aurait rejoint un grand nombre de pays industrialisés qui ont tous et depuis longtemps des distances de 1500 m et plus.
Rappelons qu’en 2006, l’Académie de Médecine proposait une distance de 1500 m. En juin dernier, le ministère de la Santé finlandais rendait un rapport dans lequel il préconisait 2km. Sa conclusion ne laissait de place qu’aux considérations sanitaires : « Les acteurs du développement de l’énergie éolienne devraient comprendre qu’aucun objectif économique ou politique ne doit prévaloir sur le bien-être et la santé des individus. »
Eoliennes : un bruit qui dérange
L’avenir nous réserve-t-il le même bon sens ? Le bruit évoqué par le Sénateur J.Germain, pour défendre son amendement, correspond aux 104 décibels (dBA) des « petites » éoliennes de 2MW (Vestas V90) et 108dBA des plus grosses (Enercon E 126). Les lois de l’acoustique entraineront un bruit audible à 1km de 33dBA pour une seule éolienne de 2MW (L1000m = 104 dBA- 11-20 log1000 = 33 dBA) et de 37dBA pour la plus puissante. Ce calcul restant théorique, car la réalité est fonction de nombreux paramètres, topographiques et météorologiques. Mais si un écran est susceptible d’en atténuer la valeur, quantité de facteurs (écho, turbulences, propagation cylindrique, synchronisation d’éoliennes…) sont susceptibles de majorer considérablement leur bruit, jusqu’à 20dBA supplémentaires (Thorne 2013) et expliquent également pourquoi les prévisions des études d’impact se trouvent régulièrement contredites par la réalité.
Les éoliennes dispensées de l’infraction sonore
Rappelons, par comparaison, que le code de santé publique caractérise l’infraction dès que le bruit total (bruit de fond + bruit incriminé) atteint 30dBA. Les éoliennes étant dispensées du respect de ce seuil depuis l’arrêté du 26 aout 2011. Dès lors, on comprend mieux les déclarations des personnes interrogées par le TGI de Montpellier, qui, alors qu’elles n’avaient porté aucune plainte, expliquaient à l’huissier mandaté pour les auditionner, qu’elles devaient monter le son de leur téléviseur, fermer leurs volets et même construire une véranda pour atténuer le bruit incessant des éoliennes. Il est vrai que les retombées financières d’une éolienne sur son propre terrain, voire celui de la collectivité locale, peut aider à en supporter les nuisances. Mais ce n’est pas pour autant que ce bénéfice en supprime les effets sanitaires. Mais surtout, l’aspect « audible » des éoliennes pourrait bien ne représenter que la partie émergée de l’iceberg.
L’impact du bruit des éoliennes sur les riverains
Les vibrations, basses fréquences et infrasons éoliens étant autrement problématiques. Les congrès bisannuels « Wind Turbine Noise » leur consacrent de nombreux rapports qui mettent en évidence la réalité du problème. La récente étude financée par la filière éolienne, elle-même ( Pacific Hydro ) « The results of an acoustic testing program – Cape Bridgewater Wind Farm » indique clairement le lien entre le niveau des infrasons éoliens et les « sensations » des riverains. Ces « sensations » comprennent des migraines, pression dans la tête, les oreilles et la poitrine, bourdonnements d’oreilles, tachycardie, sensation de lourdeur. (p212) Elles ne sont pas corrélées au dérangement par le bruit. Certaines personnes s’étant révélées plus sensibles que d’autres à ces « sensations », dont, principalement, un malentendant.
Est-ce si surprenant ? « L’Officiel Prévention » de ce mois traite des risques professionnels liés aux infrasons. Les gros moteurs à rotation lente en sont les principales sources. Le niveau potentiellement élevé des infrasons éolien y est clairement identifié. Les effets physiologiques y sont ainsi décrits : « Les infrasons provoquent alors une gêne physiologique à l’origine de troubles physiques et psychiques. Les vibrations des infrasons peuvent provoquer :
– dans l’oreille interne : des acouphènes et vertiges,- dans les globes oculaires : des troubles de la vue
– dans les organes digestifs : des nausées, des diarrhées,
– dans le cœur : des tachycardies, augmentation de la pression artérielle, dans le cerveau : des céphalées.
– Comme pour toutes les autres pressions vibro-acoustiques : irritabilité, stress, asthénie, troubles de la vigilance et de la mémoire. Les émissions d’infrasons passagères et de faible intensité sont très peu nocives à moins d’une sensibilité individuelle exacerbée ; ce sont des durées d’exposition longues et/ou d’intensité forte qui produisent des effets délétères ».
Les effets néfastes de la proximité des éoliennes
Comment ne pas faire le lien avec les « critères de diagnostic des effets néfastes de la proximité d’éoliennes » publiés par la « Royal Society of Medicine » en octobre dernier ? Les symptômes étant, en effet, en tous points identiques. On sait parfaitement, depuis 1985 et le rapport de Kelley pour l’US Department of Energy, « Acoustic Noise Associated with the MOD-1 Wind Turbine: Its Source, Impact, and
Control », les seuils que ne doivent pas dépasser les éoliennes plus de 20% du temps, selon les fréquences. Notamment 50dB à 16Hz, (p 225 du rapport). On sait également, depuis le 14° congrès sur les basses fréquences et vibrations d’Aalborg 2010, que les éoliennes sont susceptibles de provoquer la maladie vibro acoustique. Dans l’étude décrite par l’équipe Castelo Branco-Alves Pereira, ce seuil de 50dB à 16Hz était largement dépassé par les éoliennes dans la chambre à coucher principale et bien supérieur au bruit de fond lié aux infrasons du vent ou du bruissement des feuilles. (Cette étude a entrainé la décision de la Cour Suprême du Portugal du 30 mai 2013 d’ordonner le démantèlement des éoliennes DecisionNo. 2209/08.0TBTVD.L1.S1.) On sait, enfin, que la modulation d’amplitude liée au passage des pales devant le mât est particulièrement dérangeante et représente une sorte de signature du bruit éolien qui le rend bien plus gênant, à niveau égal, que n’importe quel autre source. (Janssen et Vos, 2011, Pedersen 2009…)
Cette signature est la cible de l’arrêté de Plymton -Wyoming, Ontario qui prévoit une amende de 10 000 dollars par jour à l’exploitant, si le passage des pales peut être identifié dans l’habitation de tout plaignant, dans la gamme de fréquences de 0/20Hz.Cet arrêté municipal, BY-LAW Number 62 of 2014, a été pris le 8 octobre 2014 afin de protéger les riverains des infrasons éoliens. Les conditions suivantes caractérisent l’infraction :
– Que l’identification de ces pics se produise pendant le fonctionnement des éoliennes et ne soit plus possible lors de leur arrêt
– Que le passage des pales entraine 50dB ou plus pendant une minute ou plus.
– Que les pics sonores dépassent cette valeur de 10dB ou plus.
Ces pics de 10dB dans les fréquences les plus basses ont été mis en évidence, notamment par Ambrose et Rand (à 22.9Hz) au domicile de Mc Pherson, à Falmouth Massachusetts. Le risque de « dommages psychologiques et physiologiques irréversibles » liés à ces éoliennes sera considéré comme une « évidence », p3 du memorandum de la décision du jugement de la Superior Court du Massachusetts.
Eoliennes : des plaintes sans réponses
En France, contrairement à l’idée largement entretenue, le rapport de l’Afsset de mars 2008 qui n’avait pas retenu les préconisations de l’Académie de Médecine est loin d’écarter les effets sanitaires des éoliennes, dont il reconnait d’ailleurs la possibilité de gêne excessive jusqu’à des distances de l’ordre du kilomètre (p52). Concernant les critères de nuisance retenus, ce rapport confesse même : « En particulier le domaine de validité des critères d’émergence (en termes de niveaux et de dynamique des bruits) n’a pas été vraiment exploré, et la plus totale ignorance est de règle quant à l’existence d’effets de seuil, de validité spectrale, d’application aux bruits impulsionnels, de validité en fonction de la durée d’exposition, et de limitations diverses… » La question serait elle alors de comprendre pourquoi il y aurait peu de plaintes….ou de savoir pourquoi elles restent sans réponse ?
Le rapport de la Ddass du 5 mars 2007 sur les éoliennes d’Ally et Mercœur mentionne que « La quasi-totalité des personnes rencontrées s’est plaint du bruit en extérieur. Nombreux sont ceux qui regrettent de ne plus pouvoir vaquer à leurs occupations extérieures en toute sérénité (jardinage, travaux des champs, promenades..,) lorsque le niveau de bruit est trop important. » Sept ans plus tard, ces éoliennes sont devant la justice et semblent montrer qu’il ne suffit pas de se plaindre pour être entendu.
L’épidémiologiste Carl V Phillips considère, dans son rapport, qu’« Il y a des preuves accablantes que les éoliennes industrielles causent des graves problèmes de santé sur une fraction non négligeable de résidents vivant à proximité ». Il évalue à plus de dix mille le nombre de publications qui en rapportent les effets. La question ne doit pas être détournée vers celle de l’existence, ou non, de la preuve scientifique d’un lien direct entre une caractéristique du bruit éolien et un symptôme clinique particulier, mais bien de quantifier ces symptômes, largement décrits dans la littérature médicale. C’est ce qu’affirment B.Horner, C.Krogh et R.Jeffrey dans leur analyse des publications sur le sujet présentée au 5° congrès Wind Turbine Noise 2013 à Denver, où ils soulignent l’évidence des effets, au moins indirects sur la santé du bruit des éoliennes. Les médecins canadiens sont préparés à reconnaitre « un nombre accru de patients ruraux qui se plaignent d’effets indésirables causés par des éoliennes industrielles ».
Article du 24 février 2016 | Aucun commentaire