Rubresus Association de protection et sauvegarde de l’environnement des Basses Plaines de l’Aude

Va-t-on encore longtemps fermer les yeux sur la situation sanitaire environnementale à Narbonne ?

Depuis 1959, Narbonne est le siège du site « atomique », chimico-nucléaire Orano Malvési, de purification et conversion d’uranium, unique en Europe. 500 000 tonnes d’uranium à destination de la filière nucléaire ont été produites aux portes de la ville avec des rejets massifs gazeux et liquides de polluants chimiques et des émissions de substances radioactives. Les déchets ont été stockés sur place : Installation Nucléaire de Base « INB ECRIN » pour les déchets solides et complexe de bassins d’effluents radioactifs nitratés de 350 000 m3 sur 20 ha.  Des centaines de tonnes d’un cocktail d’oxydes d’azote, dioxyde de soufre, particules fines dont des poussières d’uranium, de COV (composés organiques volatils : solvants, combustion de fuel lourd et de gaz), ont été rejetées chaque année dans l’air narbonnais. L’empreinte de Malvési est visible par la présence d’uranium dans les sédiments de l’étang de Bages Sigean jusqu’à Port La Nouvelle, à une vingtaine de km. La végétation, céréales, vigne, fruits, sols, eau des alentours du site ont montré des stigmates de l’activité uranifère (IRSN 2008, 2018).

En dépit de ce lourd passif environnemental, les campagnes publicitaires d’Orano destinées aux habitants du Narbonnais répètent à l’envi, à la limite de la provocation : « Pas d’impact sanitaire ».

Comment peut-on soutenir sérieusement cette affirmation alors qu’aucune étude épidémiologique de la population n’a été diligentée par les autorités ? Quel crédit peut-on donner à de telles incantations sans preuve de l’innocuité des rejets massifs de polluants de l’usine de Malvési ?

Par contre, certains signaux interrogent. Ainsi, l’étude statistique effectuée sur 42 855 personnes de 2009 à 2013 par l’Agence Régionale de Santé dans le cadre du Contrat Local de Santé de la Ville de Narbonne apporte des résultats significatifs et inquiétants. Avec 36 décès/an par cancer du poumon, Narbonne présente en effet un taux standardisé 26 % plus élevé que celui de la population d’Occitanie (respectivement de 55,1 décès/100 000 h contre 43,7/100 000 h). Chaque année, 33 nouveaux malades ont été diagnostiqués (taux standardisé de 55/100 000 h). Cette étude confirme la précédente étude de l’ARS de 2004-2008 qui relevait déjà des taux élevés de cancers du poumon. Il y aurait ainsi annuellement à Narbonne un supplément de 9 décès et 7 nouveaux malades par cancer du poumon par rapport à la référence régionale. Cette sur-incidence de cancers du poumon représenterait en trente ans plusieurs centaines de décès et malades pour la seule ville de Narbonne.

Pourquoi plus de cancers du poumon à Narbonne ?

La pollution de l’air est l’une des principales causes des cancers du poumon. Les cancers d’aujourd’hui sont des conséquences de pollutions d’hier. Les sources de pollution de l’air peuvent être industrielles, routières, urbaines, …

Pour Narbonne, le régime de vent dominant de Nord Nord-Ouest (Cers, 230 j/an) ne permet pas d’écarter l’hypothèse d’une exposition potentielle aux émissions atmosphériques du site Malvési. A l’inverse, l’hypothèse de la pollution atmosphérique par l’autoroute par l’A9 qui passe au sud de l’agglomération narbonnaise n’est pas étayée sous vent dominant N N-O (2/3 de l’année). Narbonne semble plus exposée aux émissions industrielles qu’autoroutières.

Le spectre de la mine d’or de Salsigne plane sur la plaine narbonnaise. La production de 120 tonnes d’or a pollué durablement la vallée de l’Orbiel (arsenic et métaux) avec des conséquences environnementales et sanitaires sous-évaluées par les autorités et responsables. A Narbonne, berceau de l’uranium, la lumière n’a toujours pas été faite sur les impacts sanitaires de la production de 500 000 t d’uranium. Il est urgent de réaliser une enquête épidémiologique qui permettrait d’analyser les conséquences sanitaires des sources de pollution et, dans l’attente, de prononcer un moratoire pour les projets générant de rejets supplémentaires de polluants (TDN : Traitement des déchets radioactifs nitratés, NVH : production de dioxyde d’uranium).


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