Rubresus Association de protection et sauvegarde de l’environnement des Basses Plaines de l’Aude

Communiqué RUBRESUS/COL.E.R.E sur le jugement relatif au recours en annulation de l’arrêté préfectoral d’autorisation de TDN

Le jugement prononcé le 15 octobre par le tribunal administratif de Montpellier a rejeté la totalité des moyens soulevés par le Cabinet ATMOS Avocats dans le recours en annulation, porté conjointement par les associations RUBRESUS et COL.E.R.E et des riverains, contre l’arrêté préfectoral du 8 novembre 2017 autorisant l’installation TDN de traitement des déchets radioactifs nitratés du site Orano Malvési Narbonne.


De notre point de vue, ce jugement n’est pas satisfaisant, ni suffisamment motivé. Notre recours comportait pourtant de nombreux et pertinents arguments, longuement développés au travers de plus de 150 pages d’écritures, tant au plan de la législation environnementale, que des éléments du dossier.


Nous soutenons, sur le fond, que le procédé TDN soulève des interrogations qui n’ont pas été levées par le tribunal, dès lors que ce procédé n’a pas été éprouvé par des essais pilotes représentatifs avec les déchets radioactifs nitratés des bassins de Malvési. Il revêt ainsi selon nous un caractère expérimental et n’apporte pas de résultats suffisants notamment sur les émissions atmosphériques en composés radioactifs, COV,…. Autrement dit, l’autorisation d’exploitation est basée sur de simples prévisions de rejets, issues de simulations et extrapolations, et autorise des rejets de polluants atmosphériques (oxydes d’azote, composés volatils, particules fines, etc.) qui viendront s’ajouter à celles du site. De plus, d’après notre analyse, le procédé TDN nécessitera des consommations massives de précieuses ressources (eau, charbon, réactifs) et rejettera des quantités considérables de gaz à effet de serre climaticides. Encore, le principe du traitement de destruction des nitrates par voie thermochimique à très haute température, dans un four volumineux à lit fluidisé de particules d’argiles et produisant de l’hydrogène, pourrait présenter des conditions critiques en cas de dysfonctionnement, et donc des risques d’émissions de gaz et d’accident.
Par ailleurs, d’un point de vue procédural, les associations RUBRESUS et COL.E.R.E ne sont pas convaincues par la position de la juridiction, qui a notamment estimé qu’un même agent de la DREAL pouvait à la fois rédiger l’avis de l’Autorité Environnementale et instruire le dossier auprès de l’autorité décisionnaire du projet TDN, c’est-à-dire le Préfet de l’Aude, alors que le droit européen et national impose l’autonomie de ces autorités, laquelle ne peut être garantie que par une séparation fonctionnelle. Le défaut d’application sans motivation des dispositions légales sur l’état de pollution des sol, telles que prévues par le Code de l’environnement, est un autre point troublant du jugement.


Le rapporteur public a rejeté tous les arguments juridiques que nos conseils éclairés ont avancé, parfois au prix d’inexactitudes flagrantes. Ainsi, le rapporteur public a avancé dans ses conclusions que le Préfet avait abaissé le niveau de rejet en phtalate DEHP par TDN dans l’arrêté d’autorisation attaqué. Or, aucune valeur limite de rejet en phtalate DEHP n’est mentionnée dans cet arrêté. Autre contradiction notée : le rapporteur public a justifié l’absence de chlore dans les gaz grâce au piégeage par l’argile et par là même l’absence de dioxines (composés organochlorés) alors que l’arrêté préfectoral autorise une valeur limite de rejet de chlore jusqu’à 60 mg/m3 confirmant la présence potentielle de chlore et impose des campagnes de mesures des dioxines.


Nous sommes donc très déçus par le contenu de la décision du tribunal administratif de Montpellier qui valide l’autorisation du procédé TDN, en dépit des pollutions atmosphériques et des risques industriels supplémentaires qu’il pourra générer. Les enquêtes sanitaires menées par l’Agence Régionale de Santé sur la population narbonnaise (plus de 50 000 h) révèlent sur une longue période de près de 10 ans la surmortalité significative par cancer du poumon plus élevée que partout ailleurs dans l’Aude, l’Occitanie et le pays. Ces données avérées et la nature des pathologies pulmonaires interrogent sur leurs causes, comme la pollution atmosphérique. D’où notre plus grande inquiétude face à l’autorisation d’accroissement des rejets par TDN, alors que la récente catastrophe Lubrizol à Rouen nous rappelle la dangerosité des sites Seveso seuil-haut, les polluants atmosphériques ayant été dispersés sur plus de 22 km à la suite de l’accident.


C’est là l’oeuvre de ré-interrogation que nous voulons poursuivre en tirant enseignement de cette lutte pour la protection de l’environnement. La population n’est jamais mieux défendue que lorsqu’elle le décide et que la société civile s’en mêle. La marge d’imprévisibilité des risques et pollutions ne doit être diminuée sous aucun prétexte ; l’actualité la plus récente nous le rappelle.


Nos actions ont eu le mérite de forcer à la transparence, d’exposer la réalité des éléments donnés et de tenter d’empêcher ce projet que nombre de narbonnais estiment nuisible. C’est donc pour cette raison que notre engagement ne s’arrêtera pas au seuil d’un premier rejet de nos demandes d’annulation.

Vous pouvez consulter ici l’intégralité des jugements.


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